
À la fin de l'année dernière, la Metropolitan Transportation Commission (MTC), l'organisme de planification régional qui supervise la région de la Baie, a fait une annonce surprenante : Non seulement elle va étendre le système de vélo partage Bay Wheels, en ajoutant 55 nouvelles stations et 2 000 nouveaux vélos électriques, mais elle va également réduire le coût de l'abonnement, qui passerait de 169 $ à 150 $ par année, et de 20 à 15 sous par minute pour les membres du programme.
La plupart des articles de presse se sont concentrés sur les chiffres, et pour cause : le prix du vélo partage a eu tendance à augmenter, et non à diminuer dans plusieurs villes américaines. Cependant, peu d'articles se sont penchés sur l'innovation qui a rendu possible l'expansion et la baisse des prix — et qui est plutôt exceptionnel pour les États-Unis.
Contrairement à ce qui se passe en Europe, il est rare — voire inimaginable — que le secteur public finance l'infrastructure et l'exploitation du programmes de vélo partage d'une ville aux États-Unis. Pensez que la ville de New York subventionne son système de traversiers, mais pas son système de vélo partage — même si le traversier transporte cinq fois moins de personnes que Citi Bike. (Capital Bikes, à Washington D.C., est une exception à la règle; la ville possède et consacre des fonds publics dans le système et, par conséquent, propose des tarifs exceptionnellement abordables pour les membres.)
En général, les entreprises privées qui gèrent les systèmes de vélo partage des villes américaines ont cherché à obtenir des revenus des usagers, des parrainages d'entreprises et/ou de la publicité afin de rentabiliser leurs investissements. Lyft, qui exploite le système Bay Wheels dans la région de la Baie (ex. : San Francisco, San Jose, Oakland, Emeryville, et Berkeley) était largement tributaire des abonnements des usagers comme principale source de revenus. Cependant, la pandémie de COVID-19 — qui a radicalement changé les habitudes de transport de la population dans la région de la Baie — a changé la donne.
Laura Krull, coordinatrice du vélo partage à la MTC, a observé la situation avec beaucoup d'inquiétude. « Dans la région de la Baie de SF, nous avons constaté un retour sur les lieux de travail beaucoup plus lent, sans compter toutes les retombées fiscales d'une inflation élevée, et les vagues de licenciements à répétition. L'utilisation de Bay Wheels a chuté de 70 % dans certaines villes ».
Si le système en péril échouait, les responsables de la MTC savaient que leurs propres objectifs ambitieux pour la région — réduire les émissions de gaz à effet de serre de 19 % avant 2035 en incitant les gens à abandonner leur voiture au profit de modes de transport plus durables — seraient également compromis. Les membres de Bay Wheels roulent dix fois plus souvent que les non-membres. De plus, les vélos électriques, qui franchissent rapidement les formidables collines de la région de la Baie, ont le potentiel de détourner encore plus de cyclistes de la voiture.
La MTC est donc intervenue pour aider. La seule question qui se posait était la suivante : d'où viendrait le financement?
C'est là que l'agence a fait preuve de créativité. La Bipartisan Infrastructure Law de 2021 sur les infrastructures a accordé un financement fédéral à l'infrastructure d'électrification grâce au Programme de réduction du carbone. Alors que la plupart des villes consacrent ce type de fonds à la construction de stations de recharge pour véhicules électriques, la MTC les a d'abord utilisé pour le vélo partage — pour développer le volet vélo électrique du système de vélo partage et pour électrifier certaines de ses stations. Il s'agit là d'un changement d'infrastructure qui peut avoir des répercussions considérables à la fois sur la disponibilité des vélos électriques et sur la réduction des gaz à effet de serre. (Ces stations pourraient un jour servir de centres de recharge pour les véhicules électriques.)
Mme Krull est optimiste : leur investissement ne sera pas seulement avantageux pour les habitants de la Baie de SF tout en contribuant à atteindre leurs objectifs climatiques, mais il servira également d'exemple pour d'autres villes américaines : « J'espère que nous serons en mesure de partager les résultats clés sur des questions importantes comme : quel est l'effet de la baisse des prix sur le nombre de passagers? Quel est l'effet de la subvention des abonnements? Et nous espérons pouvoir lancer des discussions sur de nouvelles idées de sources de financement ».
Josh Johnson, directeur principal de Lyft pour les politiques Transport en commun, vélos et trottinettes, estime qu'avec cette affectation réfléchie des fonds, la MTC ouvre la voie à un nouveau paradigme de partenariat public-privé aux États-Unis : « Nous espérons que d'autres villes pourront s'inspirer de la région de la Baie. La MTC a reconnu le besoin et a pris des mesures pour moderniser le système et mettre Bay Wheels sur la voie de la durabilité à long terme. »
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